Et le césar du meilleur film est attribué à "JUSQU'A LA GARDE" de Xavier LEGRAND. film sorti sur les grands écrans le 08 février 2018, il a tout de suite emporté l'adhésion et l'enthousiasme des critiques et des cinéphiles. Le film a également remporté le lion d'argent à la mostra de Venise ainsi que le prix des auditeurs de France inter (il faut bien dire que les prix du public ne concernent pas uniquement les navets qui ont fait plusieurs millions d'entrées mais j'y reviendrai plus bas).
Synopsis :
"Le couple Besson divorce. Pour protéger son fils d'un père qu'elle accuse de violences, Miriam la mère demande la garde exclusive. La juge en charge du dossier accorde une garde partagée au père qu'elle considère bafoué. Pris en otage entre ses parents, Julien va tout faire pour empêcher que le pire arrive."
Le ton est donné et pour un premier long métrage, Xavier LEGRAND frappe très fort, non seulement sur le sujet abordé qui est la violence conjugale mais également sur la forme et la grande maîtrise dramatique qui amène à une fin glaçante.
Dès l'ouverture du film, le plan-séquence qui dure une quinzaine de minutes nous invite dans le bureau d'une juge qui interroge les deux parties afin de prendre une décision sur la garde de Julien, l'enfant du couple. Miriam, la mère est froide, elle adopte une posture défensive, elle semble réprimer une colère et paradoxalement le spectateur ne parvient pas d'emblée à la cerner; on serait presque amené à trouver plus de sincérité chez Antoine, le père qui débite avec beaucoup d'innocence son drame de père incompris, à qui la mère voudrait faire du mal en l'empêchant de voir son fils. Toute l'ambiguité du scénario est amorcée dans ce long plan-séquence qui désarçonnera le spectateur en le mettant dans une position inconfortable tout au long du film. Quelle est finalement l'intention du réalisateur ? mise à part sa démarche dans un cinéma engagé qui dénonce une abomination et s'inscrit dans une volonté de porter la voix des femmes victime de violences de la part de leur conjoint, la mise sous tension qui va crescendo crée le malaise et nous prend presque en otage dans une sorte de jeu. Un jeu qui passe par la mise en scène, les jeux de caméra, le travail sur le son qui se rapporte au quotidien, etc...tous ces éléments sèment le doute dans l'esprit du spectateur qui ne parvient pas à savoir si le père est réellement un homme violent pouvant maltraiter son fils ou si c'est la mère qui affabule; cette interrogation persiste tout le long du déroulement de l'intrigue créant une sensation d'étouffement et le scénario glissera progressivement d'un drame familial à un thriller avec un suspens insoutenable dans les toutes dernières minutes du film....on attend qu'une seule chose : la délivrance!
Il faut tout d'abord saluer la performance de Denis Ménochet dans le rôle du père, qui nous livre un jeu d'une rare intensité et qui fait monter la tension à nous glacer le sang. Le petit garçon, de son vrai nom Thomas Giolia promet une belle carrière d'acteur tant il impressionne par la justesse de son jeu. Xavier LEGRAND nous assène un uppercut avec un film qui a tout du chef d'oeuvre et qui s'inscrit dans un genre cinématographique (la chronique sociale, la défense d'une cause) qui a fait de 2018 une grande année du cinéma français. X. LEGRAND déploie les moyens du cinéma pour parler de la violence faite aux femmes et rappelle à juste titre que l'ampleur de ce fléau n'a pas été réduite depuis le tournage du film en 2016; en effet, nous avions communément en tête la "statistique" d'une femme tuée tous les trois jours par les coups de son conjoint; aujourd'hui c'est une femme qui meurt tous les deux jours , assassinée par un mari, un ex-conjoint, un compagnon. Il est important de ne pas l'oublier.
On pourrait croire qu'un tel sujet aurait attiré de nombreux spectateurs en salle, le cinéma étant un langage qui peut parfois bousculer, émouvoir, nous saisir et nous faire réfléchir; il n'en est rien, le film a attiré quelque 400 000 spectateurs, et comme il faut aujourd'hui rendre la considération qui est due au cinéma populaire, grand public, l'académie des César a remis le prix du public au film "les Tuche 3", qui a fait près de 5 000 000 d'entrées ! On croirait à une blague sachant que la comédie en France a quand même eu de bons représentants en 2018, récompenser un film pour son nombre d'entrées n'est en rien un gage de qualité mais est simplement révélateur d'un public français qui, dans sa majorité, est friand de ce genre de cinéma bas de gamme (crise d'immaturité? promesse d'un bonheur clés en main?), cherchant avant tout le divertissement (voire la diversion ou la consolation) au cinéma et ne souhaitant pas spécialement nourrir sa réflexion...ce qui est l'inverse de ma propre démarche de cinéphile; cela étant dit, je peux admettre que la libération et la satisfaction ne passent pas pour tout le monde par un éblouissement (ou une jouissance) intellectuel(le) et esthétique.
Panem et circenses...
"Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre", dit Spinoza.
"Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre", dit Spinoza.
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